L’animal du mois
- Publié le :
- 13 mars 2018
- Catégorie :
- Actus de la réserve
L’Anomaloglosse de Blanc Anomaloglossus blanci
Cette petite espèce de la famille des Aromobatidés (proches des dendrobates) vient tout juste d’être officiellement décrite et nommée en l’honneur de l’herpétologue Michel Blanc qui oeuvre depuis de nombreuses années dans l’étude des Amphibiens guyanais.
Endémique du Nord-Est de la Guyane, elle est un exemple de plus dans la sous-estimation du nombre d’espèces amazoniennes dont le phénomène n’a été mis en évidence qu’une dizaine d’années seulement auparavant. On parle alors de la notion d’espèces cryptiques, Anomaloglossus blanci faisant partie de cette biodiversité alors insoupçonnée. Il était jusqu’à maintenant regroupé avec d’autres espèces sous Anomaloglossus degranvillei sur des bases morphologiques. Aujourd’hui cependant, l’évolution des connaissances et l’utilisation de la génétique ont permis de l’identifier comme une espèce à part entière.
C’est une petite grenouille, inféodée aux criques forestières et rocheuses. Sa reproduction est tout à fait originale et combine plusieurs spécificités surprenantes. C’est une espèce qui pratique la phorésie (comme beaucoup de membres de sa famille), c’est-à-dire que le mâle transporte ses têtards après éclosion. Ceux-ci ont la particularité d’être endotrophes, ils n’ont pas d’appareil buccal fonctionnel et se développent uniquement à partir de leur réserve vitelline. Pour pousser l’originalité jusqu’au bout, l’ensemble du processus de la métamorphose se fait sur le dos du parent. C’est une particularité propre à seulement quelques espèces d’Anomaloglossus proches.
Si Anomaloglossus blanci est un des très rares amphibiens endémiques de Guyane, il semble aussi l’un des plus menacés. Tous les naturalistes s’accordent à dire que ses effectifs semblent chuter drastiquement depuis quelques années. Devenu rare et localisé aujourd’hui, il était abondant il y a moins d’une dizaine d’années et n’est plus retrouvé sur certains secteurs où il était commun. D’ores et déjà, des études se mettent en place pour en connaître un peu plus sur l’écologie de l’espèce et tenter d’identifier les causes de son déclin.
Sur la réserve naturelle Trésor, elle était régulièrement observée au niveau du criquot qui traverse le sentier botanique d’où elle n’a plus été vue depuis 2009 malgré des recherches ciblées et des passages réguliers. En décembre 2015 cependant, un peu plus loin sur une autre crique de la réserve, une nouvelle population a été découverte et dont les individus semblent bien portants et relativement abondants. Depuis, nous suivons chaque année l’état de cette population qui semble pour le moment bien se maintenir. Les études à venir font intervenir de nombreux acteurs spécialisés dans la gestion et l’acquisition de connaissances sur les amphibiens de Guyane, en partenariat notamment avec la réserve naturelle voisine de Kaw-Roura.