Présentation
S’étalant sur près de 2500 hectares du flanc sud-ouest de la montagne de Kaw, la réserve naturelle régionale Trésor s’insère entre la route départementale n°6 (RD6) en amont et la rivière Orapu en aval.
Situation et contexte géographique
Dominant la vaste plaine marécageuse littorale, la montagne de Kaw forme le premier obstacle que rencontrent les alizés océaniques au contact du continent. Chargés d’humidité océanique, ils réagissent par une accumulation de nuages qui tendent à provoquer d’abondantes précipitations sur les reliefs forestiers. Ces conditions topographiques particulières font de cette région l’un des secteurs les plus arrosés de Guyane. La pluviométrie moyenne au niveau de Trésor dépasse les 4 mètres d’eau par an.
Cette particularité a ainsi conféré aux reliefs de la région de Kaw-Roura-Régina le rôle de zones refuges lors des périodes glaciaires où le climat du plateau des Guyanes était nettement plus sec et le couvert forestier réduit à son minimum. Ce rôle de zone refuge se traduit aujourd’hui par une forte biodiversité et un taux d’endémisme élevé.
Petite taille mais grande diversité
Malgré sa superficie relativement modeste, notamment au regard de la taille de la plupart des autres réserves naturelles guyanaises (la réserve voisine des marais de Kaw Roura s’étend sur plus de 90 000 hectares), la réserve naturelle Trésor abrite une stupéfiante biodiversité. La combinaison de facteurs physiques (reliefs), édaphiques (nature des sols) et hydriques (accumulation d’eau) a façonné la réserve en une mosaïque de milieux différents allant des forêts plus ou moins encaissées sur les pentes de la montagne aux forêts marécageuses qui bordent l’Orapu en passant par une forêt de plaine (ou forêt de flat) entrecoupée de savanes humides et de collines isolées.
Chacune de ces unités écologiques aux caractéristiques bien définies abrite son cortège d’espèces propres participant à la richesse globale de la réserve naturelle régionale Trésor.
Les milieux
La forêt haute sur sol drainé
Elle recouvre la majeure partie de la réserve, en particulier la partie montagne et la zone de flat à ses pieds. C’est le milieu le plus riche en espèces animales et végétales. La canopée forme une voûte régulière haute d’une trentaine de mètres d’où émergent ponctuellement des arbres majestueux pouvant atteindre les 50 mètres. Sous le couvert forestier, on retrouve parfois des chaos de roches latéritiques qui sortent du sol pour former un réseau de falaises et de grottes. Dans les ravines des contreforts de la montagne naissent les criques qui progressivement s’élargiront lors de leur cheminement vers les parties basses de la réserve.
La forêt marécageuse
Elle se concentre essentiellement sur une large bande en contact avec la rivière Orapu. C’est une forêt dont la composition floristique et l’organisation sont fortement conditionnées par des périodes d’inondation régulières dues au balancement des marées et aux précipitations. Les espèces végétales présentes y ont donc développé des stratégies particulières pour survivre dans un sol gorgé d’eau. Quelques espèces emblématiques poussent dans ces milieux telles que la rare Anaphylopsis americana, l’emblème de Trésor, ou un mahot protégé et endémique du nord-est guyanais, Lecythis pneumatophora.
Les savanes humides
Une des grandes particularités de la réserve naturelle Trésor est d’abriter sur son territoire un réseau de savanes incluses dans le massif forestier. Ces milieux ouverts et herbacés contrastent très nettement avec le milieu boisé environnant. De part leur originalité, les savanes guyanaises concentrent une biodiversité très spécifique strictement inféodée à ces écosystèmes particuliers.
Ce sont des milieux rares et extrêmement menacés en Guyane. A eux seuls, ils regroupent 20% des espèces végétales protégées alors qu’ils ne couvrent que 2% du territoire. Soumis à une pression anthropique très forte sur la quasi-totalité de la région, les savanes de Trésor se distinguent par leur bonne préservation augmentant ainsi la valeur patrimoniale du site.
Malgré leur aspect insulaire, elles hébergent une flore mais aussi une faune très spécifiques isolées par le manteau forestier environnant. Parmi elles, on peut citer l’Anole doré (Anolis auratus) ou la tortue charbonnière (Chelonoïdis carbonaria) pour les reptiles, des amphibiens tels que les rainettes Hypsiboas multifasciatus, Hypsiboas punctatus et Scinax nebulosus uniquement présentes dans les secteurs ouverts. A noter la présence du Manakin noir (Xenopipo atronitens), un oiseau qui n’est connu à ce jour que de cette localité en Guyane. Chez les végétaux, on note essentiellement des espèces de très petites tailles comme les plantes carnivores des genres Utricularia et Drosera bien représentés dans ces milieux.
Les collines isolées
De petits reliefs boisés sont dispersés sur les parties basses de la réserve et isolés les uns des autres par la forêt marécageuse et les savanes. Si leur composition floristique reste similaire aux forêts hautes de la montagne de Kaw, on y retrouve des espèces rares et localisées qui leurs sont propres. C’est le cas d’une espèce de Kwali (Vochysia neyrati) ou du palmier Astrocaryum rodreguiseii.
D’après des fouilles réalisées sur des secteurs similaires non loin de la réserve, ces collines auraient été le lieu de vie de populations amérindiennes puis plus tard d’habitations coloniales notamment pour l’exploitation de bois de rose ou la culture de certaines essences recherchées (cacao, café, roucou, …).